lundi 14 novembre 2011

17 jours pour comprendre, par Babette

Que cherche-t-on quand on vient au Népal ?

L’air pur puisque dans notre imaginaire Népal est synonyme de montagnes mais pour cela il faut prendre de bonnes chaussures, un bâton, suer à grosses gouttes et  grimper ;  ce n’était pas notre intension et nous n’avons  trouvé que l’air pollué de la vallée de Katmandou au-delà de ce qu’on pouvait imaginer.

Les « vieilles » pierres ; alors là pas de problème, les Durban Square des trois villes royales nous ont enchantés……mais d’autres vieilles –ou moins vieilles - pierres nous attendaient, celles dans lesquelles on bute sur les trottoirs, quand ils existent ou celles  qui bouchent les trous de la chaussée.

La chaîne de l’Himalaya  et ses sommets enneigés évidemment……Et bien  cette année, c’était plutôt en juillet  - période de mousson – qu’en octobre –période normalement claire – qu’il fallait venir  pour les voir. Leur apparition en avion  ou pendant quelques minutes à Pokhara relèvent du mirage !!

La  jungle et ses fameux tigres……et bien surprise, ce n’est pas au milieu de la forêt que nous les avons trouvés, quelques photos en témoignent.





Le dépouillement tel que l’a enseigné l’hindouiste Gandhi ou la méditation avec des moines bouddhistes…… ; il faudra chercher un petit peu car en premier lieu, ce qui saute aux yeux, oreilles et nez ce sont dévotions,  cierges, encens, offrandes et sacrifices pour l’hindouisme , dorures, couleurs vives pour le bouddhisme  . Histoire de nous compliquer la vie et de nous perdre totalement dans l’entrelacs des dieux et déesses, les népalais mélangent un peu les deux . 

Nous,  nous ne cherchions pas tout ça : nous voulions juste connaître le pays qui avait conquis le coeur de notre Eliette.
…..c’est donc peu à peu, au fil des rencontres et des visites que nous avons un peu mieux compris.

Car au début, franchement c’est un vrai choc : chaos dans la circulation, rues défoncées, immeubles en construction ou en attente…la pauvreté saute aux yeux.
Et quel bruit !!!  motos, taxis, bus, voitures  relayant sans cesse un « tutut » retentissant.
Par la suite, lors de longs voyages (en temps plus qu’en kms) en bus ou taxi nous constaterons l’utilité du klaxon : il permet de prévenir, bus, camions, voitures, motos , vélos, rikshaw, tracteurs que nous aussi on veut la place et d’indiquer aux poules, chiens, chèvres, êtres humains et bien sûr aux vaches qu’il est temps de s’écarter.  Rien de vraiment agressif dans l’attitude des conducteurs.

La pauvreté est présente partout, en ville comme à la campagne mais il semble que la majorité des népalais mangent à leur faim. En tout cas leur plat principal, le Dhal Bat, à base de riz et soupe de lentilles est très équilibré et délicieux. Il y a de la  mendicité mais jamais de harcèlement.

La nature népalaise est plutôt cool : au volant, comme  dans la vie quotidienne, tout le monde va  à la même allure, c’est à dire pas trop vite mais sans s’arrêter. Ici on apprend la patience car c’est « népali time » comme dit Eliette.  Et puis ce qui séduit très rapidement, c’est la gentillesse des népalais et surtout leur sourire et leur gaîté. Rien ne semble jamais être un problème.
Où que l’on soit, en pleine campagne ou chez un commerçant en centre ville, un simple « Namasté » (bonjour), en joignant les mains devant la poitrine, entraîne un beau sourire, un vrai qui vient du fond du cœur. Je ne parle pas des petits à qui les grandes sœurs apprennent à faire ce geste……là on craque totalement.

Ce qui marque aussi, c’est l’élégance des femmes, quelles soient en sari ou portant d’autres habits traditionnels ; c’est aussi  la  netteté des uniformes des écoliers ou lycéens qui semblent le porter fièrement. Ca parait une gageure quant on voit les conditions d’habitation de beaucoup de népalais.

Après 17 jours de découverte, je commence à comprendre pourquoi Eliette est là-bas et ce qu’elle y cherche. En tout cas ce fut un vrai bonheur de partager tous ces moments avec nos deux derniers, chacun avec leurs particularités………Namasté !

vendredi 11 novembre 2011

Si proche et si lointain, par Jean-Luc

La présence d’Eliette sur place nous a permis de sortir quelques jours hors des circuits touristiques habituels du Népal (les temples de la vallée de Katmandhu, les treks au départ de Pokhara…) 



J’ai ressenti lors cette incursion la sensation étrange d’avoir acquis subitement le don de voyager dans le temps. Nous nous somme retrouvés plongés dans la société rurale d’il y a une centaine d’années en Europe. Ici, les chars à bœufs (pardon à buffles) n’existent pas uniquement pour accueillir les touristes que nous étions mais restent un outil de travail quotidien. La cellule familiale élargie vivant sous un même toit  chez les Tharu me renvoyait aux premières images du film « 1900 » de Bertolucci- revu le mois dernier lors du Festival Lumière - lequel a été tourné en Emilie (Italie du Nord). Les scènes de moisson sont identiques à ce que nous avons vu pendant dix jours, et dans les deux cas se déroulent dans des zones fortes productrices de riz.

Nous avons traversé de plates vallées dans la région de Bardia ou bien des montagnes escarpées entre Tansen et Pohkara, mais partout on s’activait à couper le riz à la main, à monter des meules, à préparer les aires de séchage des grains. Une majorité des ouvriers m’a semblé être des ouvrières…


Longues journées synchronisées avec le lever du soleil, rythme lent  (selon nos critères d’hommes pressés du XXIè) mais en fait soutenu dans la durée, entraide  et troc au sein du village , enfants faisant des kilomètres à pied pour aller à l’école, chant collectif et tradition orale, je m’imaginais fort bien la vie de nos arrières grands-parents, pas très différente de celle que nous avons côtoyée durant cette traversée faite au rythme des bus locaux.

Les bourgades sont des lieux d’échange, de commerce, d’artisanat, d’administration où convergent les ruraux des alentours. On vit au maximum en autarcie. On revient au village pour les fêtes traditionnelles, quand on a du « s’exiler » pour trouver du travail dans une grande ville ou suivre des études plus poussées pour les plus chanceux.

En revanche, la comparaison s’arrête avec le fait qu’un certain nombre de népalais  utilisent des téléphones portables, regardent la télé, et à leur tour, font un saut temporel inverse du notre. Grâce à ces outils technologiques, sorte de pont reliant des sociétés décalées dans leur développement, certains ont un accès direct aux derniers gadgets de notre société occidentale. Un seul exemple parmi d‘autres, le garçon d’une dizaine d’années, fils du collègue d‘Eliette, discutant avec Rémi des derniers jeux vidéos disponibles sur internet...

Nos deux sociétés sont capables de se côtoyer parce que l’avion nous a amené ici en moins de temps qu’il faut pour traverser en bus le Népal dans sa longueur ! Le bus est le seul moyen de transport collectif dans ce pays sans infrastructures ferroviaires ou routières. La vitesse moyenne dépasse à peine celle de la diligence, et le luxe est de posséder une petite moto. La voiture, fortement taxée à l’importation n’est visible que dans les centres urbains. L’état des routes est à mes yeux l’un des obstacles majeurs dans ce pays au relief tourmenté pour sortir de l’ornière du sous-développement.

Une autre similitude qui m’a interpellée est la pratique assidue d’une religion très ritualisée et quotidienne. L’hindouisme nous a paru excessif dans le domaine, mais à bien y regarder la religiosité rémanente de certains pays catholiques de Europe du sud n’est-elle pas une survivance de pratiques plus généralisées en Europe il n’y a pas si longtemps ? Y-a-t-il une si grande différence entre les bougies devant les ex-voto d’une église napolitaine et les bougies déposées devant la déesse Shiva ou l’une de ses réincarnations?  On n’efface pas deux mille ans de pratique religieuse si facilement. Une ferveur certaine, mélangée de fatalisme,  guide ici les croyants et les inscrits dans le paysage social et leur fournit un cadre rassurant et protecteur. Les pratiques religieuses se mélangent et cohabitent ensemble, dans une surprenante tolérance, contraire à l’image que nous en avions au travers la partition de l’Inde et du Pakistan.

Les népalais - dénomination restrictive car la population comporte différentes ethnies encore bien marquées et seulement mélangées à la marge- nous  sont apparus flegmatiques, contents de vivre et souriants. Nous avons vu peu d’enfants pleurer. Je n’ai pas entendu une seule personne se plaindre devant nous du mauvais temps, du niveau des salaires, de la mondialisation, des banquiers pourris,  des trains- pardon des bus- qui ne sont pas à l’heure et que sais-je encore… Ils ont le temps devant eux, voire l’éternité.

Ne soyons pas naïfs, tout n’est pas rose, après qu’une monarchie ait refermé le pays sur lui-même pendant un siècle,  la guérilla maoïste a récemment empoisonné la vie du pays pendant dix ans. Cette dernière reflétait maladroitement une réelle défiance envers les politiciens du pouvoir central, de leurs petits arrangements entre amis et un ras le bol de la corruption latente. Tiens, tiens, une autre ressemblance avec ce qui se passe actuellement « chez nous »?

La pratique des langues étrangères serait en revanche à classer dans la colonne des différences. Jamais colonisé, mais proche de l’Inde, l’anglais est appris dès la maternelle dans toutes les écoles privées, et en primaire dans le public. Les enfants que nous avons rencontrés possédaient un niveau à l’oral supérieur à celui que nous avons en France… No comment.


Katmandhu reste un nom qui fait rêver, le Népal possède des paysages montagneux de rêve, maintenant en fait, je vais rêver de la gentillesse des népalais rencontrés cet automne. 

jeudi 10 novembre 2011

Katmandu vu de Paris, en mille et un détails, par Rémi

J’avais beau savoir que je serai dépaysé, je ne m’attendais pas à ça. Difficile de résumer en une phrase une telle surprise. C’est une multitude de détails qui finit par composer une mosaïque complètement inédite. Des détails comme…

Des gens qui prient tout le temps, partout, pour tout.

Un cinéma ultra moderne, salle 3D incluse. Une salle 8D (odeurs, bulles, lumière stroboscopique, éclairs, fumée, éclaboussements, vent, guilis sous le pieds – oui, oui) existe aussi, je ne l’ai pas testé.

Les téléphones sont équipés d’une véritable lampe-torche. Pratique pour éviter les entorses quand on se balade la nuit en ville, et que, ça arrive parfois, la route est parsemée de trous et l’éclairage public est défaillant.

Beaucoup d’hindouisme. Beaucoup de bouddhisme. Et beaucoup de cohabitation entre les deux. D’ailleurs, au début, on confond les deux. Après, on comprend la différence. Et encore après, on se rend compte qu’on confond encore un peu les deux, parce qu’ils s’influencent mutuellement.

Des couleurs vives à profusion, sur les maisons, dans les maisons, sur les vêtements, dans les plats, sur les marchés.

Pour dire « bonjour », on dit « namaste ». Si on le fait en joignant les paumes (comme pour prier) et en inclinant la tête en avant, c’est plus poli. 

La cérémonie de baitika, pendant laquelle les sœurs bénissent leurs frères. Ca tombe bien, c’était pile pendant mon séjour au Népal. L’année qui vient s’entame sous de jolis auspices, ma sœur a fait fuir les démons, m’a dessiné un arc-en-ciel sur le front et m’a passé un collier de fleurs autour du cou. Bon, moi, c’était facile, j’étais déjà avec ma sœur le jour-dit mais, quand ce n’est pas le cas, les frères et sœurs traversent tout le pays pour se rejoindre. Croyez-moi, le pays est rempli de sourires ce jour-là.

Les hommes sont très tactiles entre eux. Voir deux hommes qui se promènent main dans la main n’a pas la même signification que chez nous.

Pour dire « merci », on dit « daniebat ». Enfin, on peut dire ça, mais personne n’utilise ce mot. Visiblement, c’est plutôt le choix de mots qui permet de faire preuve de gratitude. Mon niveau en népalais m’empêche de vous donner un exemple.

Le décalage horaire est de 4h45 avec la France, 15 minutes de différence avec l’Inde. Histoire d’oublier la main mise qu’exerce ce géant voisin sur le Népal ?

Il y a énormément de bruits de klaxons dans les  rues. Comment décrire ça en mots ? C’est comme si le klaxon permettait d’exprimer la pensée des conducteurs. Voici un petit lexique :
« Je veux passer » = un coup de klaxon. « Pourquoi tu fais demi-tour au milieu d’une voie à sens unique ? » = un coup de klaxon. « Je suis en train de te dépasser alors que tu es en train de dépasser une autre voiture » = un coup de klaxon. « Cher piéton, tu marches au milieu de l’autoroute et je vais t’écraser dans 3 secondes » = un coup de klaxon.

Comme n’importe où, le logo de Coca-Cola est présent sur tous les édifices créés par l’homme.

En bas d’un poteau électrique, un bouton On/Off qui pendouillait. Je n’ai pas osé vérifier s’il fonctionnait. Je n’y connais rien en réseaux électriques, donc j’ai du mal à savoir si ceux du Népal sont très complexes, ou très  fragiles.

Je n’ai pas retenu le nom de chaque divinité hindouiste. Il faut dire qu’il y en a plus de trente... Euh, trente mille… Euh, trente millions. Voilà, il y en a plus de trente millions. Moi, j’ai retenu les trois principales. Brahma, le créateur ; Vishnu, l’ordonnateur ; Shiva, le destructeur – car on ne construit rien tant qu’on n’a pas détruit. (Je vous laisse réfléchir là-dessus.)

Les conducteurs  de mobylettes ont toujours un casque. Leur(s) passager(s) jamais.

Une colline en haut de laquelle plusieurs groupes de jeunes font la fête, au son des derniers tubes de chanteurs locaux. Je n’ai reconnu que Jennifer Lopez, Usher et Lil’Jon.

Physiquement, c’est impossible de définir le faciès type d’un Népalais. Certains ressemblent à des Indiens, d’autres à des Chinois, d’autres à des Thaïlandais, d’autres à des Mongols, etc. Ce petit pays serait le creuset de l’Asie ?

On croise en permanence des croix gammées et des étoiles juives. Réminiscences de guerre ? Pas vraiment, ce sont simplement des symboles de chance (pour les premières) et de l’éducation (pour les secondes).

Les Népalais sont gentils et serviables. Si vous leur demandez votre chemin, ils vous indiqueront une direction. Même s’ils ne connaissent pas l’endroit où vous voulez aller.

Il n’y a pas de serrures aux portes, que des cadenas.

Dans mes préjugés, un monastère tibétain était d’une sobriété extrême, l’épure à l’état pur. Et bien pas du tout : à l’extérieur et à l’intérieur, c’est une avalanche de formes et de couleurs que l’on découvre. Mais tout disparait quand une cérémonie commence, tant l’effet hypnotique des tambours, cymbales, cornes et mantras fonctionne. 

C’est rigolo  de voir à quel point des jeunes moines bouddhistes peuvent être exactement aussi dissipés que de jeunes écoliers français. La difficulté de rester concentré semble universelle…

(Re)découvrir en famille

Après 7 mois, les yeux de la découverte sommeillent un peu. Même si je ne me lasse pas de ce pays autant magique que chaotique, la surprise n'est plus tous les jours au rendez-vous. Ces détails qui font la différence avec la France et d'autres pays si proprets font aujourd'hui partie du quotidien. Il était donc agréable de pouvoir accueillir mes parents, Babette et Jean-Luc, et l'un de mes fréres, Rémi pour qu'ils découvrent à leur tour ce qui ne se raconte ni ne se décrit jamais facilement, ce pays si cher à mon coeur. Et cette fois-ci - que c'est étrange! - c'était moi le guide! 
Quel plaisir de pouvoir (re)découvrir en famille! Et c'est donc à cette occasion que je leur laisse à chacun la parole sur ce blog pour partager leur regard sur le Népal.

... et je rectifie ce que j'ai dit sur la difficulté à être encore surprise après tout ce temps. La cérémonie de sacrifices d'animaux (pigeons, coqs, chèvres et buffles) sur laquelle nous sommes tombés par le plus grand des hasards au temple de Devi près de Tansen fut presque irréelle. Il est tout à fait possible d'assister à ce genre de cérémonie à Katmandou mais à distance, avec des milliers d'autres spectateurs. Là, il s'agissait de festivités en petit comité, à peine une cinquantaine de personnes, et surtout... nous étions à un mètre de recevoir du sang sur nos vêtements! Dingue, complètement dingue!